Cette série d’article est issue Mémoire de master Parcours : EPABEP Éducation et pédagogie adaptées aux besoins éducatifs particulier rédigé par Jonathan ANDRÉ, T4 en 2020, et troisième année en SEGPA. Il faut ainsi lire cette série dans son contexte, celui d’un jeune enseignant qui est parachuté en SEGPA et qui a fait le choix d’y rester par le passage du CAPPEI en candidat libre dès sa première année.
L’étude de cas présentée dans ce mémoire visera à comprendre comment un enseignant spécialisé peut favoriser l’engagement actif des élèves au travers de diverses biais (aménagement, méthodologie de travail, autonomie, entraide, ressources…) afin de favoriser les apprentissages en classe de façon individuelle et collective alors que ceux-ci sont reconnus comme des élèves ayant des troubles de l’apprentissage durable.
L’étude de cas concerne deux classe de 16 élèves pré-orientés en SEGPA dans le cadre des enseignements des mathématiques, de l’anglais et des arts lors des séances de « plans de travail » d’octobre à avril mené par un professeur des écoles titulaire du CAPPEI en 2018, reconnu comme un enseignant spécialisé du collège, étant à sa 4ème année d’enseignement (dont 3 années en SEGPA et une en maternelle) et exerçant dans un collège REP+ situé dans l’un des quartiers les plus pauvres de France, de plus il s’appuie grandement sur ses précédentes expériences d’animateur socio-culturel pour assurer la gestion de classe et le climat de classe.
Il fait cours à une classe d’élèves à besoins éducatifs particuliers reconnus par la MDPH en tant qu’élèves pré-orienté en SEGPA. Chaque séance de « plan de travail » (une à deux heures par semaine et par classe) s’organise de la même façon et de ce fait est devenue ritualisée autant pour l’élève que l’enseignant. La séance débute par un accueil à la porte avec une attente de la mise en rang, après avoir capté l’attention de chaque élève, celui-ci précise l’organisation de l’heure (avec préalablement les consignes écrites sur le petit tableau de la classe pour rappel écrit) puis est suive par une entrée des élèves qui récupère chacun à leur tour leur bac contenant tous leurs effets personnels pour travailler (cahiers de maths, , cahier d’anglais, cahier d’arts, pochette de plan de travail et adaptation propre à l’élève). Un point oral et collectif est fait par l’enseignant sur l’avancée des groupes de niveaux[1] (allant de vert clair à noir : 9 niveaux en mathématiques allant du niveau CE2 à la 6ème). Chaque élève choisit et se positionne selon l’envie du moment dans la classe : ballons, chaises, tabouret, debout… Après le point collectif, l’élève démarre son plan de travail et se lève pour aller chercher les fiches correspondantes à son niveau et/ou le matériel nécessaire à l’activité, il utilise aussi un Tetra’Aides[2] pour signifier ses besoins immédiats.
Ces tétraèdres, renommés Tetra’Aides sont des outils de gestion du travail de groupe et de régulation de la parole, permettant de visualiser quand l’élève a vraiment besoin d’aide ou non (sommet vert) mais aussi quand il se fait aider ou qu’il aide un autre élève. Cela permet aussi d’indiquer clairement à l’élève qu’il travaille ou qu’il aide un camarade et peut constituer, quelque part, un rappel de la tâche en cours.
La distinction entre travail nécessitant « une aide immédiate » (sommet rouge) ou « un coup de main lorsque ce sera possible » (sommet jaune) peut faciliter l’organisation des tâches de l’élève dans son plan de travail, en l’amenant justement à se poser cette question : « Ne puis-je vraiment rien faire en attendant de l’aide de l’adulte ? ». Point important, par ailleurs : l’étape de l’aide (sommet bleu) apportée par un(e) camarade est ainsi explicitement légitimée.
Le choix d’une partie de l’enseignement en plan de travail est une situation adaptée et privilégiée pour amener chaque élève à une tâche réalisable selon son niveau et sa vitesse d’exécution des activités demandées dans le plan de travail. Bien que chaque élève ait démarré en même temps le niveau vert clair en début d’année (aux environs d’octobre après initiation au fonctionnement de la classe), ce fut pour certains un simple rappel des acquis du CE2 et des niveaux suivants avant d’arriver à leur véritable niveau (25% des élèves et bien souvent niveau CM1 ou niveau CM2 en cours d’année) et pour d’autres de nouvelles notions à découvrir puis à maitriser seul ou avec l’aide de l’enseignant ou encore d’un pair.
De plus le plan de travail s’organise autour d’une évaluation sommative avant de passer aux exercices d’apprentissage. Cette situation de mise au travail permet de donner l’espace nécessaire à l’élève pour s’engager dans une activité mais aussi de donner plus de temps par élève pour l’enseignant qui doit apporter plus de temps et de présence aux élèves en grand besoin immédiat. De plus les groupes de niveaux qui se forment naturellement au fur et à mesure de l’année ont un double objectif : se focaliser sur des besoins précis pour des élèves ciblés et aussi un rappel visuel constant du niveau en mathématiques de chaque élève pour l’enseignant (les arts et l’anglais ne sont pas encore évalués en tant que progression dans le plan de travail mais plus sur la construction d’un socle de compétences ou de culture artistique), cette répartition facilite la construction des groupes hétérogènes ou homogènes selon les besoins des dispositifs d’apprentissage mis en place par l’enseignant en mathématiques.
[1] Chaque élève progresse (chaque élève démarre en 6ème au premier niveau) sous forme de ceinture, cette démarche permet de personnaliser les apprentissages allant du CE2 à la 6ème. Pour cela, elle s’appuie sur les apports de la pédagogie Freinet et des pédagogies Institutionnelles.
[2] Sur une idée originale de Bruce DEMAUGE-BOST, professeur des écoles, école Federico Garcia Lorca de Vaulx-en –Vélin, Département du Rhône – Académie de Lyon