Cette série d’article est issue d’un dossier professionnel CAPPEI rédigé par Jonathan ANDRÉ, T2 en 2017, et première année en SEGPA. Il faut ainsi lire cette série dans son contexte, celui d’un jeune enseignant qui est parachuté en SEGPA et qui a fait le choix d’y rester par le passage du CAPPEI en candidat libre dès sa première année.
Ayant eu une vie professionnelle avant ma vie d’enseignant, j’ai toujours été sensible à l’organisation de mon espace professionnel et y ai toujours vu un facteur de bien-être et de réussite. J’y fais d’autant plus attention aujourd’hui dans le cadre scolaire mais surtout dans celui de l’ASH. Tout en adaptant mes enseignements et usant de différentiation, la question de l’adaptation de l’espace s’est imposée naturellement.
L’organisation de la salle de classe telle qu’elle existe dans la plupart des écoles et établissements français aujourd’hui peut contraindre la pédagogie : l’enseignant présente un contenu au tableau, face à des élèves assis, alignés en rang les uns derrière les autres. Les moments d’échanges se font lorsque l’enseignant pose une question, lorsqu’il circule dans la classe ou lorsque les élèves se retournent pour travailler avec leurs camarades du rang de derrière. Difficile de mettre en place de la différenciation dans ce contexte, de créer des groupes de besoin ou de favoriser le tutorat entre pairs, par exemple. Tout comme le numérique peut faciliter ces nouvelles pratiques de classe, l’agencement de l’espace et le mobilier doivent s’adapter à la mise en œuvre de nouveaux scenarios pédagogiques, en accueillant notamment des temps d’échanges collectifs, des temps de travail individuel, en binômes ou en petits groupes.
En 2011, le rapport de l’IGEN sur l’école maternelle indiquait : « Les comptes rendus de visites insistent sur l’absence d’une véritable réflexion sur la relation entre espace et pédagogie. Les enseignants utilisent l’existant, sans le remettre en cause ; les coins sont des « éléments de décor » plus que des espaces de découverte et d’apprentissage.
Il apparaît que plus on grimpe dans les niveaux de classe et moins il semble nécessaire d’avancer sur cette réflexion, on estime que plus l’élève est âgé moins l’aménagement de l’espace devient nécessaire. De plus l’arrivée au collège rime avec des classes uniformisées qui deviennent des environnements souvent neutres par nécessité organisationnelles.
Une enquête Anglo-Saxonne « The impact of classroom design on pupils’ learning » a été réalisée en 2015 sur des élèves de 6 à 11 ans :
- Elle met en avant l’influence d’éléments qui échappent aux choix de l’enseignant (luminosité, éclairage, chauffage, qualité de l’air…) mais mesure néanmoins la corrélation entre l’aménagement des espaces et la réussite des élèves et note l’importance du sentiment d’appropriation qu’en a l’élève.
- Elle démontre qu’un aménagement de la classe en espaces d’apprentissages flexibles améliore la réussite des élèves.
On retrouve aussi dans les ressources d’Eduscol un document nommé « Informer et accompagner les professionnels de l’éducation », de nombreux éléments réflexifs sur l’aménagement de l’espace scolaire souvent propre au cycle 1 et cycle 2 mais qui méritent de s’inspirer lors de la réalisation de classe à destination des cycles 3 et 4.
« Tout un imaginaire de l’enseignement et de l’autorité est engagé dans la reformulation théorique et pratique de l’espace scolaire. Il s’agit en effet de remettre en discussion, à partir de l’agencement de la salle de classe, le modèle traditionnel de l’enseignement frontal. Il faut désormais dessiner des espaces « flexibles et modulaires », en adéquation avec les évolutions des environnements numériques… »
Nos cousins outre-Atlantique l’ont surement compris avant nous et l’expérimentent depuis déjà quelques années, en effet on retrouve les origines de la « classe flexible » du côté des États-Unis et du Canada où de nombreuses recherches et tests en conditions réelles ont pu être effectuées.
En France, de nombreux projets naissent un peu partout, comme par exemple le projet « Bouge ta cl@sse » qui s’inscrit dans le cadre du projet académique Versailles 2020 et du 3e axe de la feuille de route numérique 2016-2017 « Repenser les lieux/Mobiliser tous les lieux pour enseigner et apprendre ».
Dans le cadre de ma classe au Collège Condorcet, j’ai bougé pendant des mois les tables et chaises afin de trouver une solution optimale adaptée à mes trois niveaux d’enseignements en SEGPA (6ème, 4ème et 3ème) et aux trois matières que j’enseigne (Mathématiques, Français et SVT). J’ai échangé avec mes élèves, mes collègues, ma sphère personnelle afin d’alimenter ma réflexion. Il me semblait important, sans pour autant en comprendre toute la teneur, qu’aménagement et apprentissage étaient étroitement liés.